Guillaume Eouzan l’interview

Par Maurice Largeron

Consultant Formateur Marketing Digital chez MLConseil depuis 2011. Agence Google Partner. Organisme Certifié Qualiopi.

26 décembre 2017

Suite à la sortie de l’ouvrage « webmarketing 3ème Edition aux éditions Eni, Guillaume Eouzan,  fondateur de l’agence Mindfruits , m’a gentiment répondu à quelques questions sur les sujets d’actualités chauds du Web et  du Marketing.

Bonjour Guillaume et merci de répondre à ces quelques questions J  suite à la parution de ton dernier ouvrage webmarketing.

Vois-tu plus de maturité sur la question du marketing en ligne  avec les clients de ton agence aujourd’hui, où faut-il toujours autant évangéliser ?

« Finalement, il y a un peu plus de maturité sur le côté nécessité de la transformation digitale et sur le fait d’être présent sur internet.

Par contre, le développement des compétences et des connaissances en marketing digital reste très limité.

Très peu d’entreprises ont les bonnes bases en référencement naturel. Pour tout ce qui est Ads, les entreprises investissent malheureusement comme en communication publicitaire classique : pour eux, c’est de l’achat d’espace et ils ne comprennent toujours pas que des campagnes Ads doivent être gérées et optimisées quotidiennement pour performer.

L’autre chantier majeur pour l’évangélisation, c’est l’analyse de la Data ! Nous venons de récupérer 2 clients ces dernières semaines : ce sont des sites E-commerce avec un CA entre 1,2 et 1,6 million d’€, ce qui les classe dans le top des boutiques en lignes françaises (en gros, les 1% qui font plus d’1 million). Et pourtant… Aucune d’elles ne regardait ses stats ! Pire : les 2 font du Ads et les comptes adwords/Facebook et Analytics n’étaient pas reliés ! Et ces 2 E-commerçants disposaient pourtant d’agences censées faire le boulot.

Il faut évangéliser, c’est notamment pour cela que nous formons 100 % de nos clients. Nous refusons de juste gérer pour elles ! Et plus nous les formons, plus ils sont efficaces ensuite avec nous. »

On parle à tout va des GAFA et de l’Union fait la force (alliance publicitaire française, genre Gravity, Rgpd au niveau de l’Europe), qu’en penses-tu, n’est-ce déjà pas trop tard ?

« Excellente question ! Si on prend le GAFAM (j’ajoute Microsoft), ce sont les 5 plus grosses valorisations boursières mondiales aujourd’hui ! 3 d’entre eux (Google, Amazon, Facebook) ont à peine 20 ans (à peine 10 ans pour Facebook !). Sur le marché publicitaire, c’est complètement fou : il y a un duopole Google – Facebook qui truste, en gros, les 2/3 du marché publicitaire digital mondial dans un marché qui est en expansion permanente et qui, en 2018, dépassera la TV au niveau mondial d’après les prévisions.

Le problème est que les médias traditionnels n’ont pas vraiment fait leur révolution digitale… Et proposent toujours des solutions à l’ancienne avec des ODV (Occasion De Voir, que l’on appelle « impression » dans le digital). Alors que le web c’est de l’interaction, et que sur Google ou Facebook on ne paye pas la vue mais l’interaction : il est possible de payer à la vue avec les CPM mais c’est stratégiquement stupide 😉 Or, c’est souvent proposé par les grandes agences de communication qui elles non plus n’ont toujours pas fait leur révolution digitale. C’est ce qui permet à des petites agences comme la nôtre de se retrouver à gérer des grands comptes en Ads avec des budgets de plusieurs millions d’euros annuel, grands comptes qui, eux, ont compris que l’important c’était la gestion des campagnes et la conversion qui était intéressante.

En digital l’important n’est pas de savoir si on a eu 12 millions de vues. Mais de savoir combien on a vendu. »

« Vois-tu revenir certains leviers traditionnels dans des stratégies de visibilité (médium offline : print, bus-mailing) ? »

« Oui, mais étonnement pas ceux que tu me proposes.

Il y en a un qui reste fondamental, c’est la relation presse. Il faut être clair : cela reste de loin le meilleur levier pour se faire connaître (à condition d’être vu sur une des 6 grandes chaines entre 18 h et 23 h pour la TV).

Un autre plus étonnant que j’ai constaté auprès de certains de mes clients reste l’événementiel, avec des présences sur des gros salons B2B ou des gros salons B2C. Récemment, l’un de nos clients dans la cosmétique a investi fortement pour être présent sur le salon du DIY à Paris, et cela a fait exploser leurs ventes sur le site (à mon grand étonnement !).

Pour le reste, je pense que le digital supplantera les autres leviers. Le marketing direct Mailing sera supplanté par l’automation marketing. Quand, par exemple, je vois les possibilités apportées par la plateforme Hubspot en termes de tracking et d’analyse et ensuite d’automation marketing….. Je ne vois plus vraiment l’intérêt du mailing papier. »

« Les outils numériques sont de plus en plus autonomes (ex:google adwords) et performants en termes de ciblage et d’optimisation (machine learning). Cela du coup change le rapport Marque Annonceur avec son agence, où de plus en plus de Marques internalisent la gestion des campagnes. L’agence doit du coup changer elle aussi, pour apporter plus de conseils en amont, sur la stratégie de marque. Quelle est ton opinion là-dessus ? »

« Effectivement, l’agence doit s’adapter ! Nous avons nous une expérience particulière : quand j’ai créé Mind Fruits (www.MindFruits.biz) il y a 10 ans, ce n’était pas une agence… Mais juste un cabinet de formation en digital marketing (oui, j’étais un peu précurseur). Et nous continuons aujourd’hui l’évangélisation avec le développement de notre plateforme de E-learning oncle Web (www.oncle-web.com).

Sur les Ads, nous avons de plus en plus de clients qui gèrent leurs campagnes en interne : nous les formons puis nous les coachons de façon hebdomadaire. Il faut être clair : même s’il est faisable de gérer ses campagnes en interne, les plateformes évoluent très vite, avec de plus en plus de critères d’optimisations et de plus en plus de possibilités (SEA, SMA, Native Advertising…). Et les entreprises qui souhaitent internaliser (et nous poussons à cette internalisation depuis toujours) ont toujours besoin de l’accompagnement et des conseils d’experts qui, eux, passent 8 h par jour à gérer des comptes et à faire de la veille. Les entreprises qui internalisent aujourd’hui ont rarement 1 expert Ads dédié… En général, c’est une personne du service communication qui doit gérer le SEO, le SEA, le SMO etc., et toutes ces compétences et ce travail pour 1 ou 2 personnes ça reste compliqué. Et je ne parle pas de l’analyse de la Data ! »

« Sauf erreur de ma part, tu n’abordes pas le “marketing conversationnel” (chatbots), gadget pour toi ? »

« Non pas du tout gadget… Et cela montre que tu as bien dévoré le livre avec ses 800 pages ! En fait, il faut comprendre que l’on a dû faire des choix, car le livre doit être écrit dans un temps très restreint pour être à jour le jour de sa sortie ! Nous avons ajouté beaucoup de chapitres, nous avons réécrit un très grand nombre aussi d’anciens chapitres. Pour info : nous avons décidé une semaine avant de rendre le manuscrit de reprendre tout le chapitre Adwords, du fait de la validation de la nouvelle interface par Google. Nous avons fait partie des Alpha testeurs en France, puis des bêta testeurs, mais Google nous a prévenu assez tard de sa validation !

Je crois réellement à la puissance des Tchat bot mais je pense qu’avant, il faudrait déjà passer par l’étape Tchat « tout court » pour tous les sites. Le but du livre reste de proposer des contenus pratiques applicables immédiatement. Mais je reconnais que, effectivement, nous aurions dû aborder un peu plus cette partie ! Ce sera pour la 4ème édition (et il y a d’autres thèmes que nous aurions aimé aborder mais, pour des questions de volume et de priorités, cela était complexe et il aurait fallu faire 2 volumes). Nous avons préféré proposer des chapitres les plus complets possibles, notamment en SEO et SEA, mais aussi Analytics (et tu as vu, même un petit chapitre sur les scripts qui sont devenus une de nos spécialités !) »

Au-delà de l’ouvrage, comment vois-tu le marché du webmarketing dans 5 ans (acteurs, concurrence) ?

« Vaste question !

En fait j’ai une vision qui est basée sur l’évolution des diplômes dans les grandes écoles et universités où j’enseigne.

En 2000, je faisais des conférences sur le Marketing Viral et je passais pour un extraterrestre.

Il y a 8 ans, j’ai créé à Sup de Pub Paris un des tous premiers masters en France en Digital Marketing, avec 12 étudiants la 1ere année… Et ils sont plus de 100 maintenant. Sauf que c’est tout le marketing digital en 2 ans.

Maintenant, la granularité s’opère : il y a des diplômes de référencement, de community manager, de data scientist, etc. C’est aussi comme cela que l’entreprise va évoluer.

Avant, on dissociait bien la publicité, le marketing direct, l’événementiel… Sauf qu’au sein de l’entreprise, actuellement, dès que l’on parle de digital on met tout dans le même bureau !

Je pense que d’ici 5 ans, les entreprises feront bien la différence entre tous les leviers du webmarketing, mais ce n’est pas pour autant qu’ils auront mis en place des équipes dédiées !

Nous avons encore beaucoup de travail d’évangélisation. Quand j’interviens à l’université en master management marketing, je me retrouve avec des étudiants pour qui le digital, c’est juste Facebook ! Et ce qui m’inquiète encore plus, c’est mon petit sondage de rentrée : je demande à mes masters 1 combien pensent travailler dans le marketing : 40 lèvent la main. Ensuite … je demande combien pensent travailler dans le marketing digital … Et là c’est le drame, il n’en reste que 5 !

Conclusion : la jeune génération qui est censée apporter du renouvellement dans l’entreprise où la très grande majorité des quadras du marketing et de la communication ne sont pas vraiment des webmarketeurs, n’est pas encore prête ! »

Merci Gauillaume d’avoir partagé tes convictions sur le blog et vive le webmarketing !

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